Réflexions parentales sur l’avenir postpandémie au Canada

Nadine Badets

6 mai 2020

Téléchargez cet article (PDF)

Les restrictions relatives à la pandémie de COVID-19 ont transformé la vie des familles au Canada. En raison de la fermeture des écoles, des garderies, des restaurants et de plusieurs commerces, ainsi que des importantes pertes d’emplois et des nouvelles mesures favorisant le travail à domicile, plusieurs parents et enfants passent beaucoup plus de temps ensemble qu’auparavant.

Comment les familles conçoivent-elles la vie après la pandémie? Selon des données recueillies pendant six semaines par l’Institut Vanier de la famille, l’Association d’études canadiennes et la firme Léger, les familles ne sont pas prêtes à renvoyer leurs enfants à l’école cette année, mais les parents sont disposés à réintégrer leur milieu de travail après la pandémie. C’est ce qu’indiquent certains résultats de cette série de sondages en cours1.

La peur du coronavirus est plus forte chez les familles qui ont des enfants

Au 6 mai 2020, les enfants et les adolescents de 19 ans et moins représentaient une faible proportion des cas de COVID‑19 au Canada (5 %)2. Toutefois, près de 30 % des adultes vivant avec des enfants et des adolescents de moins de 18 ans craignent fortement qu’un membre de leur famille immédiate contracte la COVID-19, comparativement à 22 % de ceux qui vivent sans enfant3 (figure 1).

Malgré cela, plus de la moitié des adultes vivant avec des enfants (56 %) affirment qu’ils appuieraient une politique gouvernementale visant à assouplir les restrictions de distanciation sociale (physique) pour toutes les personnes de moins de 65 ans, alors que 42 % des personnes vivant sans enfant appuieraient une telle politique.

La plupart des parents ne veulent pas que leurs enfants suivent des cours d’été pour rattraper le retard

Plus de 80 % des parents vivent avec leurs enfants pendant la pandémie, et 7 % partagent la garde de leurs enfants avec un parent vivant au sein d’un autre ménage. Six parents sur 10 (60 %) déclarent qu’ils discutent davantage avec leurs enfants actuellement qu’ils ne le faisaient avant le confinement. Les parents d’enfants d’âge scolaire explorent également le système éducatif avec leurs enfants en tant que nouveaux enseignants, tuteurs et aides aux devoirs. L’éducation à domicile est difficile pour plusieurs familles4, en plus de susciter des inquiétudes à l’égard du retard que prennent les élèves.

La plupart des provinces n’ont pas encore annoncé leur intention de rouvrir les écoles, et les trois territoires ont confirmé qu’ils comptaient maintenir les écoles fermées jusqu’en septembre. Toutefois, le Québec s’est engagé à rouvrir la plupart des écoles primaires le 11 mai et, en date du 29 avril 2020, l’Ontario et la Nouvelle-Écosse ont prévu des dates d’ouverture provisoires plus près du mois de juin, mais leurs dates butoirs changent constamment5. Lorsqu’on les a interrogés à cet égard, les deux tiers (66 %) des parents ont affirmé que, même si les écoles au Canada ouvrent avant la fin de juin, ils préfèrent que leurs enfants ne retournent en classe qu’en septembre, plutôt que d’aller à l’école durant l’été (en juillet et en août) en vue de rattraper le temps perdu.

Plus de la moitié des parents sont disposés à retourner au travail, mais ils ne veulent pas utiliser les transports en commun

La pandémie de COVID-19 a engendré d’innombrables pertes d’emplois à l’échelle du pays6, et les parents vivant avec des enfants qui considèrent la crise sanitaire comme une « menace importante » pour leur emploi sont plus susceptibles d’affirmer se sentir tristes, anxieux ou nerveux, par rapport aux personnes vivant sans enfant7.

Parmi les personnes qui ont conservé leur emploi, celles qui vivent avec des enfants sont plus susceptibles de se déclarer satisfaites des mesures instaurées par leur employeur afin de réagir à la COVID‑19 (59 %) que les personnes sans enfant (37 %). Cet écart peut s’expliquer par le fait que la situation permet aux parents de travailler à domicile tout en s’occupant de leurs enfants, les garderies et les écoles étant fermées. Environ 55 % des adultes vivant avec des enfants déclarent travailler actuellement à domicile (figure 2). Les personnes vivant avec des enfants sont également plus susceptibles (54 %) que les personnes sans enfant (37 %) d’affirmer qu’elles seraient à l’aise de réintégrer leur milieu de travail une fois les restrictions liées à la COVID‑19 levées.

Cependant, plus de 60 % des parents ont affirmé qu’ils ne seraient pas à l’aise d’emprunter les transports en commun, et ce, même lorsque les restrictions liées à la COVID‑19 commenceront à être assouplies, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les déplacements lorsque les gens se rendront à leur lieu de travail (figure 3). Les adultes vivant avec des enfants sont plus susceptibles de dire qu’ils préféreraient se rendre au travail seulement lorsque c’est nécessaire (39 %) que les personnes sans enfant (27 %).

Les parents abandonnent leurs projets de vacances, la plupart ne voyageront pas en 2020

En plus d’exprimer leur malaise à l’égard des transports en commun, les parents ne se disent pas moins préoccupés par rapport aux voyages. Environ 6 adultes sur 10 (59 %) vivant avec des enfants ont indiqué avoir dû modifier leurs projets de vacances en raison de la pandémie de coronavirus de 2020, probablement en lien avec le confinement au Canada et la fermeture des frontières autour de la semaine de relâche. Lorsqu’on leur a demandé s’ils comptaient prendre des vacances en 2020, 72 % des parents ont répondu que c’était peu probable.

Nadine Badets, Institut Vanier, en détachement de Statistique Canada

 


Notes

  1. Un sondage de l’Institut Vanier de la famille, de l’Association d’études canadiennes et de la firme Léger, mené du 10 au 13 mars, du 27 au 29 mars, du 3 au 5 avril, du 10 au 12 avril, du 17 au 19 avril et du 24 au 26 avril 2020, comprenait environ 1 500 personnes de 18 ans et plus qui ont été interrogées à l’aide d’une technologie ITAO (interview téléphonique assistée par ordinateur) dans le cadre d’une enquête en ligne. Tous les échantillons, à l’exception de ceux du 10 au 13 mars et du 24 au 26 avril, comprenaient également un échantillon de rappel d’environ 500 immigrants. À l’aide des données du Recensement de 2016, les résultats ont été pondérés en fonction du sexe, de l’âge, de la langue maternelle, de la région, du niveau de scolarité et de la présence d’enfants dans le ménage, afin d’assurer un échantillon représentatif de la population. Aucune marge d’erreur ne peut être associée à un échantillon non probabiliste (panel en ligne, dans le présent cas). Toutefois, à des fins comparatives, un échantillon probabiliste de 1 512 répondants aurait une marge d’erreur de ±2,52 %, et ce, 19 fois sur 20.
  2. Agence de la santé publique du Canada, Maladie à coronavirus de 2019 (COVID-19) : Mise à jour quotidienne sur l’épidémiologie (consulté le 6 mai 2020). Lien : https://bit.ly/2z9rMFJ
  3. Voir la note 1.
  4. Jessica Wong, « Frustrated Parents in Ontario Pivot from Official Distance-Learning Program Amid COVID-19 », CBC News (30 avril 2020). Lien : https://bit.ly/3aTOMFR
  5. CBC Kids News, When Will Your School Reopen? Check Out This Map (29 avril 2020). Lien : https://bit.ly/2KMhcGW
  6. Statistique Canada, « Enquête sur la population active, mars 2020 » dans Le Quotidien (9 avril 2020). Lien : https://bit.ly/2YDGkIm
  7. Jennifer Kaddatz, « Les familles peinent à composer avec les conséquences financières de la pandémie de COVID‑19 », Institut Vanier de la famille (9 avril 2020).

 

Retour en haut